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L'Homme Volcan, Mathias Malzieu, Frédéric Perrin & Dionysos

L’homme Volcan est un livre numérique enrichi réalisé par Actialuna qui est une agence de design de livre numérique qui « orchestre avec les éditeurs, le travail des ingénieurs et des auteurs en créant des interfaces innovantes et ergonomiques pour le livre ». Pour L’Homme Volcan, l’éditeur en question est Flammarion. Une coédition (réalisée avec l’aide du Centre National du Livre) est donc à  l’origine de cette « fiction adulte numérique » écrite par Mathias Malzieu, illustrée par Frédéric Perrin et mise en musique par Dionysos. Le livre a été largement diffusé gratuitement, avant de retrouver un prix de vente de 3,59 €. Il n’est lisible que sur les appareils d’Apple (donc pas sur liseuse) et il s’agit d’un livre-application, c’est-à-dire que ce n’est pas un epub (format standard du livre numérique) et qu’il n’est pas vendu sur les sites des librairies. Bref, aujourd’hui je vous parle de L’Homme Volcan, parce que je trouve l’objet franchement réussi.

L'Homme Volcan, une création de Mathias Malzieu, Frédéric Perrin et Dionysos

Il était une fois…

Une petite fille, Lisa, raconte l’histoire de son frère Germain, de 3 ans son cadet, insupportable garnement qu’elle aime inconditionnellement. Alors qu’il déteste l’école, il découvre un jour Voyage au centre de la terre de Jules Verne et se passionne pour les livres. Pour l’encourager, ses parents les emmènent lui et Lisa visiter le volcan islandais Snaefelljokull, point de départ des héros du roman de Jules Verne. Mais alors un drame se produit, Germain tombe dans le volcan et meurt. Quatre ans plus tard, il réapparait sous la forme d’un mystérieux fantôme dans la chambre de Lisa.

Une esthétique de conte de fées moderne

Mathias Malzieu reprend plusieurs des canons du conte de fées, genre caractérisé par le remaniement, l’adaptation et le remixage d’histoires merveilleuses populaires. Dans L’Homme Volcan, on retrouve ainsi : le héros inadapté à son environnement, la solidarité fraternelle, la transformation du personnage dans la mort, la sortie du foyer familial et le danger qu’il représente, la découverte de la sexualité, l’initiation et le passage au statut d’adulte (Germain est devenu « l’homme volcan »), la peur de la mort, la figure de l’ogresse… Ce qu’il y a de passionnant avec les contes, c’est qu’ils sont hautement significatifs et L’Homme Volcan se prête particulièrement bien à l’interprétation littéraire.

Un pas de côté

Pourtant, on n’y retrouve pas tout à fait le développement traditionnel du conte et par ailleurs Mathias Malzieu y a introduit une touche de mélancolie, empreinte de poésie : « Et pourquoi tu es revenu me hanter, moi ? – Parce que tu as des morceaux de cœur cassé dans ta tête et que tu es assez folle pour m’aimer pour ce que je suis devenue ». Également, l’univers narratif et visuel du livre, proche de celui d’auteurs comme Tim Burton, Benjamin Lacombe ou Guillaume Bianco (Billy Brouillard), est fortement teinté de macabre, mais aussi de dérision et d’absurde. Un pas de côté par rapport au genre du conte qui caractérise peut-être sa modernité.


Intertextualité de L'Homme Volcan
Des références à l'univers de Peter Pan

Référence de L'Homme Volcan à Hansel et Gretel
... et à celui d'Hansel et Gretel

Une expérience de lecture augmentée

Venons-en maintenant à la question de la navigation dans ce livre augmenté. La page de couverture de L’Homme Volcan est animée et sonore, on y découvre le thème musical composé par Dionysos (le groupe de Mathieu Malzieu), qui sera décliné tout au long de l’histoire (dont personnellement j’adore la mélodie). Une lecture avec écouteur est conseillée, car une ambiance sonore accompagne le défilement des pages (bruit du vent ou battement fragile). Le livre est composé de 7 scènes d’une dizaine de pages chacune, animées par une illustration en milieu ou fin de scène, émergeant petit à petit d’un brouillard sur lequel le texte semble imprimé (« fond de page »). C’est le lecteur qui en « tournant » la page anime les belles illustrations de Frédéric Perrin, qui explique dans le making-of avoir voulu donner du volume et de la profondeur à la page. Pour Mathias Malzieu, l’objet fini « n’est plus un livre, mais autre chose qui se donne à lire et à écrire différemment ». L’Homme Volcan est-il pour autant toujours un objet littéraire ? Je crois personnellement que oui, car tout étant une œuvre visuelle et sonore, il s’inscrit clairement dans le genre littéraire qu’est le conte. En tout cas, il offre certainement une expérience de lecture réussie, car l’objet reste clos et on n’a aucun souci d’immersion dans l’œuvre.

Pour aller plus loin

— ci-dessous, la vidéo du making-of de L’Homme Volcan